Adichanallur se trouve sur la rive droite de Tamarabrani dans le district de Thoothukudi à l’extrême sud du pays tamoul. Korkai,l’ancienne capitale de la dynastie des Pandyas est à 15 km de Adichanallur.On parlait beaucoup de ce petit village dans les journaux régionaux ( j’insiste le mot »régionaux ») en 2005. Grâce aux fouilles dirigées par Archeolgoical Survey of India (ASI) entre 2003 – 2005, Adichanallur devient peu à peu populaire jusqu’ alors inconnue même chez les Tamouls. Ce site archéologique date de l’âge du fer.Cette découverte fascinante a révélé un témoignage retentissant du passé glorieux et avancé des Tamouls.
Dr.Jagor,un éthnologue et explorateur allemand était le premier à découvrir cette nécropole. Il avait mené les fouilles au hasard et avait deterré des urnes funéraires en terre cuite (mudoumakkal thazhi en tamoul) Ces urnes sont de toutes tailles et toutes formes. Également, s’y trouvaient des armes et des outils en fer,principalement des couteaux,des dagues,des haches etc. En grande quantité, on signalait la présence des ossements et des squelettes. La plupart des objets découverts avaient été emportées par Jagor et disposées au musée de Berlin.( A voir et vérifier par les Tamouls à Berlin).
Ensuite,venait le tour d’un officier britannique de ASI, Alexander Rea. Il commençait ses fouilles en 1889 s’étendant jusqu’au 1905. Hormis d’innombrables belles poteries, il répertoriait également des armes et des outils en fer,des ustensiles et objets personnels en bronze,des outils ménagers en pierre, des colliers,des ornements en or, etc. Au dedans des urnes se révélaient des traces vestimentaires,des balles de riz et millet. Des lampadaires,des flèches,des lances,des épées, des figurines des animaux,etc s’ajoutent à la longue liste des fouilles comptant environ 2000.
Louis Lapicque, un Français, s’est également lancé dans cette aventure en 1904.
En 2004, des jeunes indiens dynamiques sous la direction ambitieuse de
M. T.Sathyamurthy ont entamé leurs fouilles. Presqu’un centenaire s’est écoulé entre les deux fouilles. Ces travaux s’avéraient plus fructueux que les recherches précédentes. A la surprise de tout le monde, ils ont découvert une nécrople qui s’étendait sur une quarantaine d’hectares. Sur 157 urnes funéraires, 57 en étaient intactes. Des squelettes entiers en position accroupie ont été signalés dans les 15 autres. Ce cimetière était planifié à trois niveaux : l’enterrement ancien succédait au plus récent et pour l’enterrement futur, l’espace vide avait été prévu. En grand nombre, on trouvait des mêmes objets que les deux dernières fois. Il y avait,également, une inscription de Tamil-Brahmi. Certains érudits refusent d’y voir une écriture. Donc, le déchiffrement reste contestable. Contrairement à l’usage, l’inscription se trouvait à l’intérieur d’une urne. La datation de ces découvertes peut se ranger entre 800-500 an av.JC.
Autrement,on pouvait citer aussi d’autres découvertes importantes et surtout ces poteries aux motifs géometriques qui ,selon les archéologues désignent les marques des clans. Il y avait dès fois des empreintes digitales. On pourrait dénombrer aussi une urne couverte par une deuxième. Ce qu’on appelle twin-pot system. C’était une question d’hygiène, il semblait.
Et pour couronner le tout, venait une découverte extraordinaire. Ce sont des motifs bien appliqués dedans une urne où il y avait des ossements. Parmi ces motifs, nous distinguons bien au centre,une grande femme fine à la poitrine saillante et vêtue jusqu’au genoux. Ses mains étant tout près de son corps,ses paumes y sont éloignées. Les archéologues sont unanimes que la femme représentait la Mère-déesse. Cette représentation indique le culte de la fertilité. A côté d’elle,on peut noter une gerbe de riz et sur sa tige se posait une grue. On énumère aussi un cerf et un crocodile. Afin de donner un effet dentelé à chaque motif, un petit fil fin avait été utilisé. En général, ce genre de motifs repère-t-on sur les peintures rupestres et non sur la poterie.
Depuis la découverte de cette nécropole, un mystère intriguait les archéologues. Où habitait-elle cette population qui ensevlissait ces morts ? Où avaient-ils fabriqué les perles d’une extrême perfection ?Les fouilles entamées par ASI en 2005 ont élucidé cette question. Un site d’habitation est trouvé à 500 m de la nécropole. Il y avait des vestiges d’un rempart,3 fours à poteries avec du charbon,des cendres et des morceaux de pots. Apparemment,la population était très engagée en activités industrielles. Les archéologues suggèrent que c’était une civilisation de nature urbaine.
Y a-t-il un rapport entre Adichanallur,Harappa et Mohenjadaro? On ne pourrait pas y établir un lien, faute de preuves solides. Personne ne sait quelle langue parlait-on à la civilisation de l’Indus. Le déchiffrement du script de l’Indus défie les épigraphistes depuis plus d’un siècle. Pour déchiffrer n’importe quelle écriture,trois critères sont indispensables : primo, la langue du peuple à ce temps-là ; secundo,les textes bilingues et tertio, les textes devraient être longs. L’écriture indusienne ne répond à nul de ces critères. Alors que la langue de Adichanallur est plus ou moins confirmée comme tamoul,tenant compte de la proximité géographique. La litérature tamoule de l’âge sangam décrit les us et coutumes identiques à Adichanallur ainsi se rapprochant de la langue tamoule. Le script ressemble beaucoup à Tamil-brahmi, selon Iravatham Mahadevan,un expert incontestable et autoritaire dans ce domaine.
Or, en 2006, un instituteur local aux environs de Mayiladuthurai, est tombé sur un objet précieux. Il s’agit d’une hache néolithique (1500 av.JC)en pierre sur laquelle se trouvait une inscription. Elle ressemblait beaucoup à celle de l’Indus. Aussi,en 2008,d’autres fouilles dévoilent les ressemblances avec l’écriture de l’Indus.
Le débat acharné s’enflamme entre les partisans des langues pro-dravidiennes du sud et pro-aryennes du nord. Assumons que l’écriture est dravidienne,on pourrait néanmoins affirmer et sans équivoque qu’il y avait eu des échanges culturels entre les deux peuples de deux extrémités. Ce qui manque cruellement sur ce fait, est qu’une recherche nette et indépendante est impossible. Aucune recherche à ce sujet n’est impartial. Souvent on dramatise ou dédramatise! Il y a beaucoup de subjectivités que d’objectivités. Souvent les Indiens du nord n’admettaient pas la primauté civilisationnelle du sud . Ils rejettent en bloc les opinions venant du sud. Pourtant
60 % des trouvailles archéologiques viennent du pays tamoul mais les excavations entreprises au sud de l’Inde sont beaucoup moins nombreuses que celles du nord.. Au cas où il y aurait d’autres fouilles en l’avenir, on pourrait s’attendre à des grandes surprises.
Revenons au début de l’article! J’ai mis l’accent sur le mot « régionaux »,vous rappelez-vous?. Voilà pourquoi! Aucuns journaux nationaux, excepté « The Hindu »ont détaillé sur ces découvertes dramatiques. Soit ils ont complètement ignoré ou on l’a traité en fait divers. Même les régions voisines de Tamil Nadu traitaient ces informations avec indifférence. Or, c’est un fait historique bien établi.
Si vous êtes interessés à savoir davantage, vous êtes priés de consulter d’innombrables articles et des débats sur le web dont la plupart sont en anglais ou tamoul. Vous pourriez consulter Tamil-brahmi, Asokan brahmi, Adichanallur, civilisation de l’indus,Iravatham Mahadevan, Asko Parpalo, S.R.Rao,Archeological survey of India, etc.
Un musée est en voie de construction à Adichanallur dans le but d’exhiber les fouilles qu’on y a trouvées. Mais les travaux sont arrêtés abruptement pour une raison quelconque souvent bidon. Quand est-ce que ce musée verra son jour? Ce rêve s’accomplira ou s’enfouira comme ces vestiges fabuleux de nos ancêtres?
Seul le Temps répondra…
Gérard JOSEPH.
Remerciements: Le Trait d’Union,Pondichéry.